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Le rôle des ONG dans la réalisation des ODD en Amérique latine

Dernière mise à jour : 29 mai


ONG amérique latine ODD ONU

Aujourd'hui, il existe environ 10 millions d'organisations non gouvernementales (ONG) dans le monde. Les organisations non gouvernementales, également connues sous l'acronyme ONG, sont des organisations, comme leur nom l'indique, qui ne font pas partie d'un gouvernement et dont l'objectif est purement social. Ces organisations n'ont pas de but lucratif. Le terme d'ONG est apparu en même temps que la création de l'Organisation des Nations Unies (ONU) en 1945. Les groupes engagés dans la réalisation d'un objectif social existaient déjà avant la Seconde Guerre mondiale, mais c'est vraiment après la guerre que ce terme a commencé à être utilisé. Dans la Charte des Nations Unies signée le 26 juin 1945, on retrouve pour la première fois l'expression « organisations non gouvernementales » à l'Article 71 du Chapitre X : « Le Conseil économique et social peut prendre les dispositions appropriées pour des consultations avec les organisations non gouvernementales traitant des questions relevant de sa compétence ».[1] Cependant, l'ONU n'a proposé une définition claire de ces organisations que le 27 février 1950, dans une résolution du Conseil. Quelques années plus tard, cette date est devenue la Journée internationale des ONG.


Aujourd'hui, les ONG jouent un rôle essentiel pour relever les défis économiques, sociaux et environnementaux des sociétés. Ils sont devenus des représentants des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) de l'Agenda 2030 créé par l'ONU en 2015. Le programme qui comprend les 17 ODD a été approuvé par les dirigeants mondiaux de l'ONU en septembre 2015 et est entré en vigueur le 1er janvier 2016. Les pays se sont engagés à doubler d’efforts pour mettre fin à la pauvreté, réduire les inégalités et lutter contre le changement climatique dans les 15 prochaines années. Voici ces 17 objectifs représentant les aspects clés du développement durable :

17 objectifs de développement durable ONU

Source : United Nations, «Objetivos de Desarrollo Sostenible | Naciones Unidas», United Nations, https://www.un.org/es/impacto-acad%C3%A9mico/page/objetivos-de-desarrollo-sostenible.


Selon l'ONU, le développement durable peut être définie comme la capacité de « répondre aux besoins de la génération actuelle sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ».[2] Cette définition utilisée par les Nations Unies a été conçue dans le rapport de 1987 intitulé « Notre avenir à tous » de la Commission mondiale sur l'environnement et le développement. Le développement durable repose sur trois piliers : la croissance économique, l'inclusion sociale et la protection de l'environnement. Elle a un aspect économique, social et environnemental. Ces trois éléments sont interconnectés. L'ONU met particulièrement l'accent sur l'éradication de la pauvreté sous toutes ses formes, la considérant comme une condition essentielle pour parvenir à ce développement durable. [3]


Ainsi, dans quelle mesure les organisations non gouvernementales sont-elles des acteurs clés du développement durable en Amérique latine et quels sont leurs défis en 2023 ? Tout d'abord, nous analyserons la relation entre la réalisation des ODD et les ONG, en prenant comme exemples l'ONG mexicaine EQUIS, Compromiso Migrantes au Chili et l' ONG Ayuda en Acción au Pérou. Ensuite, nous étudierons les besoins socio-économiques et politiques des territoires dans lesquels ces organisations opèrent. Enfin, nous présenterons les mesures mises en œuvre par les ONG pour répondre aux besoins de chaque territoire et les résultats obtenus.

 

 

Relation entre les organisations non gouvernementales (ONG) et les objectifs de développement durable (ODD) en Amérique latine

Présentation des Objectifs de Développement Durable (ODD) étudiés et réflexion

 

ODD 4 : « Éducation de qualité »

L'éducation est définie comme « l'enseignement et la doctrine donnés aux enfants et aux jeunes » ou l'enseignement donné par l'action pédagogique.[4] L'éducation est un processus permettant l'ascension socio-économique[5] et nécessaire pour mettre fin à la pauvreté. En 2018, plus de 300 millions d'enfants et de jeunes âgés de 5 à 17 ans ne sont pas scolarisés dans le monde. En d'autres termes, un enfant ou un jeune sur 5 ne va pas à l'école.[6] En 2020, avec la pandémie de COVID-19, la plupart des pays ont annoncé la fermeture temporaire des écoles. Cette situation a touché plus de 90% des étudiants dans le monde. La pandémie a affecté la qualité d’apprentissage des enfants et des jeunes, impactant davantage les populations plus vulnérables marginalisées qui ne pouvaient pas bénéficier de l'enseignement à distance.    

 

Assurer une « éducation de qualité » signifie, entre autres, élargir l'accès à l'éducation et augmenter le taux de scolarisation à tous les niveaux, en particulier pour les jeunes filles. Pour ce faire, ces enfants doivent d'abord bénéficier d’une éducation préscolaire de qualité afin de se familiariser avec l’environnement de l'école. Ensuite, il est nécessaire de veiller à ce que tous les enfants terminent l’enseignement primaire et secondaire gratuitement, sans discrimination. Les filles et les garçons, les femmes et les hommes doivent bénéficier des mêmes droits et des mêmes opportunités et de la même formation à tous les niveaux, mettant ainsi fin à la discrimination fondée sur le sexe et le genre. Les personnes handicapées et autres minorités doivent être incluses dans le système éducatif. Tout le monde doit pouvoir avoir accès à l’éducation et acquérir les compétences nécessaires pour accéder à un travail décent.


Cet objectif comprend également l'amélioration du système éducatif par l'amélioration des infrastructures avec des investissements, le développement de bourses pour les pays en développement, et la sensibilisation des étudiants aux questions de développement durable.


ODD 10 : « Réduction des inégalités »

 

L'inégalité est un terme très large, pouvant englober différents éléments. Le Programme des Nations Unies pour le développement définit l'inégalité comme quelque chose qui ne concerne pas seulement l'inégalité des richesses. L'inégalité peut inclure d'autres aspects de la vie tels que l'accès aux services de santé, l'espérance de vie, l'accès à une éducation de qualité, etc.[7] Les inégalités peuvent se produire à différents niveaux, à l’échelle mondiale, mais aussi régionale, ou à l’échelle d’un pays. Des inégalités peuvent également exister entre des personnes d'âges différents, des personnes de sexes ou de groupes sociaux différents. Pour toutes ces raisons, il est impossible d’éliminer complètement les inégalités. Par conséquent, on parle davantage de « réduire » les inégalités. L'ODD 10 est probablement l'ODD le plus ambitieux et le plus insaisissable en raison de toutes les facettes du concept d’inégalité.

 

L'objectif 10, qui est en réalité un ODD présent dans tous les autres objectifs, vise à promouvoir l'inclusion socio-économique et politique de toutes les personnes sans faire aucune discrimination. Pour réduire les inégalités et garantir l'égalité des chances et de traitement, les gouvernements doivent éliminer ou modifier les lois, les politiques et autres normes telles que les pratiques discriminatoires et promouvoir une législation appropriée. Les gouvernements doivent avant tout se concentrer sur les politiques fiscales, salariales et de protection sociale. À échelle mondiale, les pays en développement ou sous-développés devraient bénéficier d'un soutien économique accru, ainsi que d'une plus grande représentation et intervention dans la prise de décisions au sein des organisations internationales. Enfin, l'ONU promeut la promotion d'une migration plus facile et plus sûre par le biais de politiques migratoires planifiées.

 

ODD 5 : « Égalité des sexes »


Les inégalités entre les femmes et les hommes existent dans toutes les régions du monde et se manifestent dans tous les domaines de la vie des femmes, notamment par une difficile insertion professionnelle, des salaires plus bas, un manque de représentation politique et plus de temps consacré aux tâches domestiques. Selon la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), il existe de nombreux obstacles empêchant les femmes d'exercer pleinement leurs droits fondamentaux. Ces obstacles sont les suivants : les inégalités socioéconomiques et la persistance de la féminisation de la pauvreté ; les modèles culturels patriarcaux discriminatoires et violents et la prédominance de la culture du privilège ; la division sexuelle du travail ainsi que la concentration du pouvoir et des relations hiérarchiques dans la sphère publique, excluant les femmes des prises de décision.[8]

 

Selon un rapport de la Banque mondiale de 2022[9], environ 2 400 millions de femmes en âge de travailler n'ont pas les mêmes opportunités que les hommes. 178 pays présentent des obstacles juridiques qui les empêchent de participer activement à l'économie. Dans 86 pays, les femmes sont confrontées à une forme de restriction du travail, et 95 pays ne garantissent pas un salaire égal pour un travail de valeur égale.

 

Cependant, l'inégalité entre les sexes ne se reflète pas seulement dans la sphère professionnelle. L'inégalité entre les sexes peut se manifester dans la vie quotidienne d'une personne par la discrimination, les discours de haine, la violence physique ou morale. Dans sa forme la plus extrême, la violence fondée sur le genre, qui peut être définie comme « celle qui est exercée sur les femmes par ceux qui sont ou ont été liés à elles par des relations affectives »,[10] peut conduire à des crimes fondés sur le genre (féminicides).

 

L'objectif 5 vise à mettre fin à toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et des filles dans le monde en éliminant, entre autres, la violence et toutes les formes d'exploitation qui existent. L'ONU dénonce des pratiques telles que les mariages d'enfants, les mariages précoces et forcés ou les mutilations génitales féminines. Le travail domestique doit être rémunéré par le biais des services publics et des infrastructures de protection sociale. Les femmes devraient avoir les mêmes droits sociaux et économiques et les mêmes opportunités professionnelles que les hommes. L'accès universel à la santé sexuelle et reproductive fait partie des mesures qui doivent être mises en œuvre. L'égalité des sexes doit être promue par des politiques, des lois qui protègent les droits des femmes et par des outils technologiques pour sensibiliser les citoyens.

 

Au cours des dernières décennies, les questions de genre sont devenues centrales dans nos sociétés, cependant, les objectifs de développement durable et cet objectif 5 ne mentionnent pas l'existence de genres autres que féminins ou masculins et ne mentionnent pas, par exemple, l'existence des personnes transgenres et l'importance de les protéger.

 

Tous les Objectifs de Développement Durable sont liés les uns aux autres. L'égalité entre les femmes et les hommes contribue à la réduction des inégalités. La réduction des inégalités entre les sexes signifie que l'éducation est de meilleure qualité et offre une égalité des chances. L'objectif 17 « Partenariats pour atteindre les objectifs » est en fait présent dans chacun des objectifs. Chaque objectif implique une alliance des différents acteurs sociaux et économiques pour les atteindre.

 

Cependant, certaines critiques peuvent être formulées à l'égard des ODD. Les Objectifs de développement durable succèdent aux Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), qui ont été approuvés en 2000 lors de la 55e Assemblée générale des Nations Unies et devaient être atteints en 2015. En réalité, l'adoption des ODD par l'ONU reflète l’échec des pays à appliquer les OMD. En 2012, il a été reconnu que les OMD ne seraient pas mis en œuvre en lançant un autre projet « Post-2015 ». Bien que les ODD soient plus ambitieux que les OMD, avec 9 objectifs de plus, ils sont, dans une certaine mesure, le reflet de promesses qui n'ont pas été tenues par les pays jusqu'à présent.

 

En outre, les ODD nécessitent une coopération internationale pour les réaliser, mais dans un contexte où l'ordre international change, où différents blocs tels que les États-Unis, la Chine et la Russie sont indirectement confrontés à travers de guerres commerciales, de tensions politiques, de menaces d'utilisation d'armes nucléaires, la réalisation de ces objectifs semble de moins en moins assurée. Ce qui est certain, c'est que tous les acteurs sociaux doivent participer à l'accomplissement de ces objectifs. Les organisations non gouvernementales jouent un rôle fondamental en raison du poids qu'elles peuvent avoir et des mesures qu'elles peuvent mettre en œuvre sur les territoires en développement.

 

La longue route vers l’atteinte des ODD en Amérique latine

 

En Amérique latine, les efforts faits pour la réalisation des ODD diffèrent en fonction des pays, mais nous allons nous concentrer sur la situation générale du sous-continent qui semblait en effet s'améliorer au début du XXIe siècle mais qui a été chamboulée par l'arrivée du COVID-19 effaçant les progrès qui avaient été obtenus en matière de développement durable.

 

Analyse de la situation avant la pandémie : 1990-2020

 

L'un des objectifs de développement durable présentant la meilleure amélioration entre 1990 et 2015 est le numéro 1, « Pas de pauvreté ». Selon le rapport de la CEPALC « Amérique latine et Caraïbes : un regard vers l'avenir à partir des objectifs du Millénaire pour le développement »[11] réalisé en 2015, les pays ont réussi à réduire considérablement leurs niveaux d'extrême pauvreté. Le Honduras avait un taux d'extrême pauvreté de 46,9 % en 1990 alors qu'il atteignait 16,4 % en 2012. Le Brésil est passé de 16,23 % à 3,75 %. En 2019, le taux d'extrême pauvreté de la région était de 11,4 %.[12] Cependant, le rapport indique également que 50 % de la population de la région était encore en risque de pauvreté.


En ce qui concerne la protection de l'environnement, si de nombreux pays de la région ont fait des progrès substantiels dans l'élaboration de législations environnementales grâce à la création d'institutions chargées de gérer ces politiques, les résultats sont limités par les politiques industrielles menées par les pays de la région. Le modèle industriel des pays d'Amérique latine ne prend généralement pas en compte les externalités environnementales négatives des activités économiques.


En termes de ressources naturelles, la région abrite près de la moitié de la biodiversité de la planète,[13] et entre 1990 et 2014, tous les pays de la région ont pu augmenter leurs zones terrestres et marines protégées de plus de 5 %, et l'utilisation de substances détruisant la couche d'ozone a diminué de 95 % entre 1990 et 2013. Les différents systèmes de zones protégées jouent un rôle essentiel dans la préservation des ressources naturelles. Cependant, la région continue d’enregistrer des niveaux élevés de pollution de l'eau, de l'air et du sol qui ont de graves répercussions sur la santé publique et qui s'avèrent être la conséquence des modèles de développement évoqués ci-dessus. Selon le rapport « Défis et stratégies de développement durable en Amérique latine et dans les Caraïbes » réalisé par la CEPALC en 2018[14], une rivière sur quatre en Amérique latine est considérée « gravement polluée » par la production agricole et industrielle destinée à l'exportation.


En outre, on estime que plus de 100 millions de personnes en Amérique latine sont exposées à des niveaux élevés de pollution atmosphérique. La mauvaise qualité de l'air est à l'origine d'environ 35 000 décès prématurés chaque année dans la région. En 2012, 80 000 décès ont été attribués à la pollution de l'air dans les maisons. Encore une fois, l'industrie est le principal responsable de la pollution, en particulier l'industrie chimique avec toutes les substances chimiques rejetées dans l'air.


Pour conclure sur ce sujet, le rapport révèle également que l'accès à l'électricité est très inégal dans la région. Près de 22 millions de personnes dans la région n’ont pas accès à l’électricité.

 

En ce qui concerne la sécurité sociale et l’égalité des genres, les femmes latines accèdent plus facilement au marché du travail, elles sont financièrement moins dépendantes de leur partenaire et un plus grand nombre d’entre elles ont accès à la sécurité sociale. Néanmoins, elles sont toujours celles qui doivent se charger des tâches domestiques et celles qui prennent en charge (gratuitement) des personnes âgées. Le temps consacré par les femmes aux tâches ménagères limite leurs possibilités d'obtenir un emploi décent, réduit leur accès à l'éducation et représente un obstacle fondamental à leur autonomie financière et à la réduction des inégalités entre les sexes. Si le rapport de la CEPALC montre qu'en 2014, le revenu principal d'un tiers des ménages latino-américains provenait d'une femme, des dynamiques machistes persistent encore dans la sphère domestique limitant l’indépendance des femmes latines.


Comme dans d'autres parties du monde, l'Amérique latine connaît un vieillissement de la population et ces changements dans la pyramide démographique sont le résultat du développement de la région avec un triomphe limité des politiques publiques dans les domaines de la santé, de la protection sociale et de l'industrie qui a su tout de même générer des opportunités socio-économiques. Cependant, les services de protection sociale sont encore insuffisants. Les ménages les plus vulnérables doivent prendre en charge les personnes âgées de leur famille et aujourd'hui, ce fardeau est principalement porté par les femmes. En outre, le vieillissement de la population de la région pose un autre problème aux femmes. Comme les femmes ont une espérance de vie plus longue que les hommes, mais qu'elles ont moins de chances d’obtenir un emploi décent voire formel, et donc à une couverture sociale, elles seront plus exposées à la pauvreté à un âge avancé.

 

Enfin, abordons le sujet de la violence et de la sécurité de la population dans la région. L'Amérique latine doit toujours faire face à des défis liés à la cohésion sociale qui affectent la capacité des États à assurer un développement durable. Les taux élevés de violence sont une représentation de la désintégration sociale et politique qui existe en Amérique latine et démontrent que de nombreux efforts de la part des gouvernements restent à faire pour parvenir à un développement durable. La région a souvent été décrite comme la plus violente de la planète. Le rapport indique que de 1995 à 2018, le taux régional d'homicides volontaires pour 100 000 habitants a été supérieur à 20, voire à 30 alors que les taux mondiaux sont généralement inférieurs à 7 homicides volontaires pour 100 000 habitants. En 2017, ce chiffre s’élevait à 89 homicides pour le Venezuela et 60 pour le Salvador de 60 meurtres pour 100 000 habitants. La perte de contrôle des États et de légitimité de la justice freinent le développement durable. La violence est liée, entre autres, à la situation économique des pays. Une économie défavorable facilite l'expansion des activités criminelles et de la corruption. De plus, les inégalités, le manque de programmes sociaux et l'exclusion sociale sont d'autres facteurs culturels alimentant la violence, notamment celle fondée sur le genre. Bien que l'Amérique latine et les Caraïbes soient l'une des régions du monde où le plus grand nombre de progrès ont été réalisés en matière de violence sexiste à niveau juridique, le phénomène se poursuit et la région compte 14 des 25 pays ayant les taux les plus élevés de féminicides dans le monde. Selon le rapport de la CEPALC mentionné plus tôt, au Mexique, plus de 7 femmes sont assassinées chaque jour. En Bolivie, 53 % des femmes mariées ou en couple ont déclaré avoir subi des violences physiques ou sexuelles de la part de leur partenaire.

 

En résumé, à la fin du XXe siècle et au début du XXIe siècle, des progrès significatifs avaient été réalisés dans la région et des scénarios optimistes étaient élaborés pour l'avenir de l'Amérique latine, même si de nombreux efforts restaient à faire pour espérer atteindre les objectifs fixés par l'ONU. 

 

Analyse de la situation dans la région à partir de 2020

 

Avec l'arrivée du COVID, les progrès qui avaient été réalisés jusqu’à présent dans la région ont été effacés. D'une part, la pandémie a eu un effet dévastateur sur les inégalités et la pauvreté. Notons que le marché du travail en Amérique latine est caractérisé par une très forte informalité. Dans la région, environ 50 % des travailleurs ont des emplois informels.[15] En conséquence, ces travailleurs n'ont pas pu accéder aux services sociaux offerts par les Etats tels que les allocations chômage, provoquant l’augmentation de la pauvreté. La CEPALC a estimé qu'en 2020, le taux de pauvreté en Amérique latine et dans les Caraïbes touchait 33,7 % de la population[16] et que le nombre de personnes en situation d'extrême pauvreté s’élevait à 13,8 % de la population.[17] Malgré ces résultats, la situation aurait été bien pire sans les mesures d'urgence prises par les gouvernements. La CEPALC estime que, sans ces mesures, l'extrême pauvreté en 2020 aurait été supérieure d'environ 1,8 point de pourcentage.[18] En ce qui concerne les inégalités, il est clair que la pandémie les a exacerbées. Le rapport « Les impacts sociodémographiques de la pandémie de COVID-19 en Amérique latine et dans les Caraïbes » publié par la CEPALC en 2022 indique qu'entre 2019 et 2020, l'indice de Gini moyen dans la région a augmenté de 1 %. Cette augmentation aurait été de 4 % si des mesures d'urgence n'avaient pas été prises.

 

D'autre part, la pandémie a mis en lumière les failles des systèmes de santé des États d'Amérique latine, le manque d'accès des populations aux services de base et les problèmes du système d’éducation. La COVID-19 a clairement démontré les faiblesses des systèmes de santé dont la segmentation et le manque de financement ont rendu difficile une réponse adéquate et efficace à la pandémie. De même, les problèmes d'accès aux services de base tels que l'eau ou l'électricité se sont aggravés pendant la pandémie en raison d'une réduction du pouvoir d’achat des ménages, en particulier des ménages les plus vulnérables, mettant parfois leur vie en danger. En termes d'éducation, malgré l’usage d’Internet pour poursuivre les études à distance, la qualité de l'éducation s’est considérablement dégradée pendant la période de confinement. De plus, l'existence d'une fracture numérique entre les différentes classes socio-économiques et des conditions à la maison plus ou moins propices à l'apprentissage, les inégalités entre élèves se sont accrues. L'interruption de l'année scolaire a également eu un impact sur les élèves qui étaient déjà défavorisés avant la pandémie, exacerbant encore les inégalités.

 

Pour terminer, voyons quels ont été les impacts de la pandémie sur les inégalités entre les sexes à l'aide d'informations extraites du rapport de la CEPALC mentionné ci-dessus. Avant la pandémie, les femmes avaient déjà la charge de nombreuses tâches ménagères non rémunérées. Ce fardeau s'est considérablement accru pendant la pandémie avec les confinements, les fermetures d'écoles et la prise en charge des personnes potentiellement infectées par la COVID-19 dans leurs foyers. Cet ensemble de tâches a grandement impacté le rôle des femmes dans le monde du travail, les obligeant parfois à quitter leur emploi pour se concentrer sur les tâches domestiques. Il est important de préciser que les femmes autochtones et afro-américaines ont été encore plus touchées par la pandémie et toutes ses conséquences. De même, le taux d’activité des femmes a enregistré une baisse considérable depuis le début de la pandémie, représentant une perte de 18 ans de progrès (51,8 % en 2019 à 47,7 % en 2020 pour les femmes contre 75,5 % à 70,8 % pour les hommes). Là encore, les femmes afro-américaines et autochtones ont été les plus touchées, notamment parce que 85 % des femmes autochtones ont des emplois informels ne leur permettant pas de bénéficier des aides financières mises en place par les gouvernements pendant la pandémie. Les femmes présentent également des taux de pauvreté plus élevés que les hommes. Par exemple, en Colombie, en 2020, le taux de pauvreté des hommes était de 32 % alors qu'il était de 35,3 % pour les femmes. En Argentine, le taux de pauvreté était de 25,2 % pour les hommes et de 27,5 % pour les femmes.

 

Pour conclure, il est clair que les progrès qui auraient pu être réalisés au début du XXIe siècle en matière de développement durable dans la région ont été freinés par la pandémie. Le 28 avril 2023, des représentants des agences des Nations Unies, des organisations régionales et de la société civile des 33 pays d'Amérique latine se sont réunis à l'occasion de la sixième réunion du Forum des pays d'Amérique latine et des Caraïbes sur le développement durable. Lors de ce forum, les délégués ont déclaré qu'après près de 10 ans, seuls 24,6% des objectifs fixés par l'ONU en 2015 ont été atteints.[19] Même si la tendance est plutôt positive pour 48,4 % des 17 ODD elle n'est pas suffisante pour espérer atteindre les objectifs puisque pour 27% d’entre eux, les pays régressent. Il est évident que les ODD ne seront pas atteints, notamment dans des domaines tels que la santé, l'éducation ou l'égalité des sexes, entre autres. Pour atteindre ces objectifs, les Etats doivent réaliser d’importants investissements notamment dans les services de protection sociale, l’égalité des chances et la restructuration du marché du travail. La coopération entre tous les acteurs économiques tels que les gouvernements, les autorités nationales et locales, le secteur privé, le système financier, la société civile, voire les ONG, est essentielle pour la réalisation de l'Agenda 2030 pour le développement durable.


 

Le rôle des organisations non gouvernementales (ONG) en Amérique latine


ONG amérique latine 17 ODD ONU

Comme mentionné précédemment, il y a aujourd'hui plus de 10 millions d'ONG dans le monde. Les ONG jouent un rôle fondamental pour relever les défis sociaux, économiques et environnementaux de nos sociétés. Ces défis, bien qu'ils soient encore plus importants dans les pays sous-développés, existent dans toutes les régions du monde. Les ONG peuvent avoir des impacts à l’échelle locale, nationale et/ou internationale. Elles peuvent prendre différentes formes juridiques : association, fondation, coopérative, etc. Cependant, toutes les ONG cherchent à impacter positivement la communauté qu’elles servent. Ces organisations sont à but non lucratif. Les ONG contribuent à sensibiliser la société aux questions sociales, humanitaires et environnementales. Elles ont également pour objectif de venir compléter les lois et les politiques des États ou des organisations internationales afin de protéger les personnes ou l'environnement.

 

L'essor des ONG en Amérique latine a eu lieu dans les années 1980 avec le virage néolibéral dans la région et la démocratisation de nombreux régimes autoritaires comme l'Argentine en 1983, le Brésil en 1985 ou le Chili en 1980. Les ONG ont grandement bénéficié de ces deux changements majeurs dans le sous-continent. Les politiques néolibérales mises en œuvre à cette époque qui considèrent l'État providence comme un échec ont provoqué l'émergence de nouvelles classes sociales marginales qui ont de ce fait eu besoin d'organisations non gouvernementales. La réduction des aides sociales, d’une part, et l’émergence de la démocratie, d’autre part, ont donné un nouveau sens à ces organisations. Le nombre d'ONG dans la région a beaucoup augmenté dans les années 1980. Par exemple, une étude estime que le nombre d'ONG en Bolivie est passé de 218 en 1980 à 897 en 1993.[20] Cependant, l'âge d'or des ONG dans la région s'est produit entre 1990 et 2001 au cours duquel de nombreux investisseurs du Nord du continent ont participé au financement des ONG en Amérique latine et où les alliances entre les secteurs privé et public se sont développés. L'émergence dans la région des premières politiques de développement durable visant à protéger l'environnement et à lutter contre la pauvreté a également contribué à donner plus de poids aux ONG dans la région. De plus, avec l’émergence des nouvelles démocraties, la question des droits de l’Homme a de nouveau sa place dans les systèmes latinoaméricains.


Aujourd'hui, les ONG en Amérique latine se concentrent principalement sur la lutte contre la pauvreté, les droits des femmes, le commerce équitable, le respect des droits de l’Homme, l'éducation et la santé et ainsi répondre aux besoins de leurs territoires comme nous le verrons dans la prochaine partie de l'essai.


 

Mexique : EQUIS Justicia

X justicia para las mujeres mexique

Source : Equis Justicia, https://equis.org.mx/


EQUIS Justicia est une organisation féministe qui depuis 2011 agit au Mexique pour transformer les institutions, les lois et les politiques publiques et ainsi améliorer l'accès à la justice des femmes mexicaines. L'organisation promeut de nouvelles façons de lutter contre la violence et la discrimination fondées sur le genre en recherchant les causes structurelles de ces phénomènes. L’organisation travaille avec les institutions gouvernementales et judiciaires pour apporter des propositions et trouver des solutions fondées sur des recherches et des études chiffrées et solides. À travers des partenariats avec des organisations de la société civile, EQUIS Justice vise à renforcer l'audit citoyen. L'activité d'EQUIS Justice a un impact sur la réalisation des ODD 5 et 10. L'organisation intervient dans 3 domaines :

  • Prévention et protection contre la violence basée sur le genre : Garantir la protection des femmes par le droit pénal, en promouvant l'application de lois qui les protègent.

  • Garantie de l’accès à la justice pour toutes les femmes : en particulier les femmes mexicaines qui ont été historiquement rendues invisibles, principales victimes de l'échec des politiques de sécurité, telles que la guerre contre la drogue et la militarisation du pays.

  • Justice et égalité sans discrimination : Garantir l'accès à une justice non discriminatoire. L'objectif est de créer un système de justice qui réponde aux besoins de chaque femme. De manière générale, EQUIS promeut l'égalité des sexes et dénonce les discriminations à l'égard des personnes handicapées ou des minorités. Par exemple, EQUIS travaille avec CADIN au Yucatán pour renforcer le leadership des femmes autochtones mayas.

 

EQUIS Mexique compte plus de 20 alliances avec différentes organisations dans le pays. Elle réalise des reportages et des campagnes, sensibilise les citoyens aux droits des femmes, organise des marches et vient en aide aux victimes.


 

ChilI : Compromiso Migrante

 

compromiso migrante chili

Source : Compromiso Migrante, https://compromisomigrante.cl/


Compromiso Migrante est une ONG chilienne qui aide les migrants à s’intégrer à la société chilienne en respectant les lois du pays. Compromiso Migrante reconnaît pleinement la contribution des migrants au développement du Chili et, par conséquent, l'importance de les aider à s’intégrer. « Être un immigré, ce n'est pas être un fardeau pour le Chili, mais une contribution au développement social et économique du pays. »[21] Les valeurs et les principes de l'organisation reposent sur la volonté de construire une société chilienne plus juste, fondée sur le pluralisme, la durabilité et la justice. L'organisation défend les migrants afin qu'ils obtiennent les mêmes droits et les mêmes opportunités que les citoyens chiliens, sur la base de la loi chilienne et de la Déclaration universelle des droits de l'Homme. Compromiso Migrante a trois objectifs clés :

  • Fournir aux migrants un accès à une éducation de qualité

  • Conseiller et accompagner les migrants sur des questions telles que : la santé, l'emploi, l'intégration sociale, etc.

  • Être un lien entre l'État chilien et la communauté immigrée.


À travers ses actions, Compromiso Migrante est acteur des objectifs 1, 4, 10 et 17. L'organisation publie régulièrement du contenu pour aider les migrants dans leurs démarches avec l’administration publique. Des discussions hebdomadaires sont organisées autour de sujets pouvant susciter l’intérêt de la communauté migrante. De plus, les bénévoles de l'organisation se trouvent dans diverses régions du pays leur permettant d’aider les communautés migrantes dans tout le pays. L’organisation veille à garder informer à sensibiliser les migrants sur les droits dont ils disposent par le biais de formations, de réunions d'information.


 

Pérou : Ayuda en Acción


ayuda en accion pérou

Source : Ayuda en Acción Perú, https://ayudaenaccion.org.pe/


Ayuda en Acción Perú est une organisation qui existe depuis 35 ans et dont l'objectif est de promouvoir le développement durable et la croissance au Pérou à travers une éducation de qualité, de formations professionnelles et un soutien aux PME péruviennes. L'ONG contribue à la formation professionnelle des étudiants. L’organisation développe l'utilisation des technologies de l'information et de la communication (TIC) chez les enfants et promeut des actions coordonnées entre les élèves, les enseignants, les parents et les autres membres de la communauté éducative afin de garantir une éducation de qualité à tous les élèves péruviens et de réduire les fractures scolaires. L’ONG sensibilise également les PME aux questions sociales et environnementales tout en les aidant à accroître leurs bénéfices.

 

À travers ce soutien aux étudiants et aux entreprises péruviennes, l'ONG joue un rôle fondamental dans le développement des régions péruviennes et la croissance durable. L'organisation intervient pendant 15 ans environ dans une même communauté, lui permettant d’avoir un impact à long terme. Elle opère dans 9 régions du Pérou et compte 25 alliances d'entreprises pour mener à bien les projets.


Les besoins des territoires en développement étudiés : Chili, Mexique et Pérou


Principaux indicateurs économiques du Mexique en 2022 (selon les données officielles de la Banque mondiale)[22]

Produit intérieur brut (PIB) en milliards de dollars américains (US$)

1,41

PIB par habitant, en dollars américains (US$)

11.091,3

Croissance annuelle du PIB (%)

3,1

Chômage total (en % de la population active totale)

3,3

Investissements directs étrangers (IDE), entrées nettes de capitaux (% du PIB)

2,8

 

Principaux indicateurs sociaux du Mexique (selon les données officielles de la Banque mondiale)[23]

Ration de la population pauvre disposant de moins de US$1,90 par jour (% de la population)

3,1 en 2020

Espérance de vie à la naissance

70 en 2021

Population

125 504 125 en 2022

Migration nette

-52 649 en 2021

Indice du capital humain (productivité)

0,6 en 2020

 

Selon un rapport de la CEPALC, 72,9 % de la population est touché par la pauvreté en 2020[24] (près des trois quarts de la population). Ce chiffre est beaucoup plus élevé que le chiffre donné par la Banque mondiale, la CEPALC utilisant l’indicateur MPI (Multidimensionnel Poverty Index) qui est indicateur de pauvreté beaucoup plus complet qui n’analyse pas seulement la capacité financière des ménages mais aussi leur accès à l’éducation, à la santé et leurs conditions de vie. Le chiffre obtenu par la CEPALC fait démontre d'importants écarts d'inégalité au Mexique. Ces inégalités peuvent expliquer le phénomène d’émigration du Mexique vers d’autres pays. En plus des inégalités de revenus, le Mexique est confronté à de profondes inégalités entre les sexes.


Le féminicide est la manifestation la plus extrême de la violence subie par les femmes et les filles. Au Mexique, 3 825 femmes ont été victimes d'homicide en 2019, ce qui signifie que 10 femmes sont assassinées chaque jour.[25] L'égalité des sexes au Mexique se heurte à d'importants défis structurels de la société mexicaine caractérisés par la non application des lois et peu de respect des droits des femmes au quotidien. Voici quelques chiffres du gouvernement mexicain[26] démontrant l'inégalité entre les sexes au Mexique :

  • Les femmes consacrent 43,2 heures par semaine aux tâches ménagères et à la famille, tandis que les hommes n'y consacrent que 15,8 heures.

  • Le travail non rémunéré des femmes à domicile équivaut à 17,5 % du PIB, celui des hommes à 5,8 %.

  • Le taux de participation économique des femmes est de 43,8 %, celui des hommes de 77,5 %. Le taux de participation économique des femmes autochtones est d'un peu plus de 21 %.


Pour conclure, le Mexique est l'un des pays les plus inégalitaires du monde.[27] Les inégalités socioéconomiques et les inégalités entre les sexes sont l'un des nombreux problèmes structurels du pays. Le Mexique est un État violent alimentant les écarts d'inégalité déjà existant. Le pays doit réformer ses infrastructures, modifier les lois pour offrir plus de protection et une meilleure justice à ses citoyens. Cependant, la lutte contre les discriminations doit être menée à tous les niveaux de la société, les lois ne suffisent pas, mais elles constituent une base juridique que la société civile peut utiliser pour faire évoluer la mentalité de la population.

 

 

Principaux indicateurs économiques du Pérou en 2022 (selon les données officielles de la Banque mondiale)[28]

Produit intérieur brut (PIB) en un milliard de dollars américains (US$)

242,63

PIB par habitant, en dollars américains (US$)

7.125,8

Croissance annuelle du PIB (%)

2,7

Chômage total (en % de la population active totale)

3,7

Investissements directs étrangers (IDE), entrées nettes de capitaux (% du PIB)

4,5

 

 

Principaux indicateurs sociaux du Pérou (selon les données officielles de la Banque mondiale)[29]

Ration de la population pauvre disposant de moins de US$1,90 par jour (% de la population)

2,9 en 2020

Espérance de vie à la naissance

72 en 2021

Population

34 049 588 en 2022

Migration nette

68 012 en 2021

Indice du capital humain (productivité)

0,6 en 2020

 

Le Pérou bénéficie d’une stabilité macroéconomique, d’une ouverture commerciale et un d’un environnement international favorable qui a permis au pays de devenir une économie à revenus intermédiaires. En effet, si l'on regarde le PIB par habitant, il est passé de près de 2 040 dollars en 2002 à 7 126 dollars ($) en 2022.[30] Le pays a une faible dette publique, d'importantes réserves internationales et une banque centrale solide.


Cependant, le développement du pays pays continue de faire face à des obstacles importants tels que les impacts du changement climatique, les inégalités et une économie dépendant du prix des matières premières telles que le cuivre. En outre, le travail informel est toujours très présent, représentant 18,9 % du PIB péruvien en 2019.[31] Les travailleurs du secteur informel n'ont pas accès à une protection sociale et aux autres services publics, alimentant les inégalités.


De nouvelles politiques et infrastructures sont nécessaires pour lutter contre l'informalité et réduire la pauvreté ainsi que les inégalités. L'amélioration des services publics, le renforcement de la gouvernance, un environnement commercial formel favorable et la stabilité politique sont essentiels à la croissance et au développement durables du Pérou.



Les principaux indicateurs économiques du Chili en 2022 (selon les données officielles de la Banque mondiale)[32]

Produit intérieur brut (PIB) en un milliard de dollars américains ($)

301,03

PIB par habitant, en dollars américains ($)

15.355,5

Croissance annuelle du PIB (%)

2,4

Chômage total (en % de la population active totale)

7,8

Investissements directs étrangers (IDE), entrées nettes de capitaux (% du PIB)

6,9

 

Principaux indicateurs sociaux du Chili (selon les données officielles de la Banque mondiale)[33]

Ration de la population pauvre disposant de moins de US$1,90 par jour (% de la population)

0,7 en 2020

Espérance de vie à la naissance

79 en 2021

Population

19 603 733 en 2022

Migration nette

113 709 en 2021

Indice du capital humain (productivité)

0,7 en 2020


Le Chili est le pays le plus développé d'Amérique latine. Avec un IDH de 0,819 (sur une échelle de zéro à un), le Chili se classe au 40e rang mondial et au premier rang en Amérique latine.[34] L'inégalité des revenus, mesurée par le coefficient de Gini, a atteint 0,43 en 2022.[35] L’espérance de vie est élevée, c’est l'une des plus élevées d'Amérique latine. Le Chili présente une bonne productivité et un PIB par habitant satisfaisant.

 

En termes de migration, depuis plusieurs années, le Chili s’est convertit en un pays de destination pour beaucoup de migrants. La croissance économique rapide, ma réduction significative de la pauvreté et le retour à un système démocratique ont fait du Chili un pays attrayant. Le pays accueille chaque année de plus en plus d'immigrants, comme le montre le graphique ci-dessous :

 

migration chili

Source : «Población», Migración en Chile, https://www.migracionenchile.cl/poblacion/.


Le Chili vit actuellement une crise migratoire. En 2021, le président chilien Gabriel Boric et son gouvernement ont lancé une nouvelle politique migratoire qui est entrée en vigueur en 2023. Cette dernière a accru le contrôle aux frontières du pays et ne permet en aucun cas aux migrants illégaux de rentrer sur le territoire chilien. La délivrance des titres de séjour se fait au cas par cas sous plusieurs conditions.

 

Les cinq premières origines géographiques des immigrants en Chili en 2020 sont le Venezuela (30,7 %), le Pérou (16,3 %), Haïti (12,5 %), la Colombie (11,4 %) et la Bolivie (8,5 %), qui représentent ensemble environ 79,3 % du total.[36] De plus, le Chili est la 4ème destination des migrants vénézuéliens.[37] La crise politique et économique et la pénurie de biens de première nécessité au Venezuela expliquent en grande partie la migration des Vénézuéliens vers le Chili. Cependant, la population immigrante est souvent exclue surtout lorsqu’il s’agit de migrants en situation non régulière. Même lorsqu'ils sont en possession de visas et de permis de séjour, les migrants restent victimes de discrimination de la société chilienne, qui ne les reconnaît pas pleinement comme des sujets de droits.


L'impact des ONG sur leur communauté

 

Au Pérou, Ayuda en Acción aide à lutter contre l’informalité et les inégalités en offrant aux citoyens une éducation, des formations et des opportunités professionnelles. L'organisation dispense une éducation de qualité aux plus jeunes à travers 45 centres éducatifs dans le pays.[38] Grâce à l'ONG, 3 805 élèves ont atteint le niveau minimum de compétence en lecture et en mathématiques au cours d'une période scolaire.[39] Cette formation scolaire leur permettra plus tard d'obtenir un emploi décent. En outre, l'ONG organise des ateliers de formation professionnelle pour les adultes afin de développer leurs compétences, leur permettant de se démarquer sur le marché du travail et d’avoir accès à de plus grandes opportunités d’emplois. Les participants aux formations développent de nombreux savoir-faire et compétences telles que la gestion des conflits, le service client ou le travail d'équipe. Grâce aux différents programmes d’Ayuda en Acción, 4 708 personnes ont pu développer des compétences techniques qui leur permettra d’obtenir un emploi formel ou de démarrer leur propre entreprise. En outre, 2 278 personnes ont d’ores et déjà pu accéder à un emploi rémunéré ou diriger une entreprise. [40] Ayuda en Acción aide les associations et les PME à élaborer des business plans durables, à se différencier sur le marché et être moteur de changements au sein de la société péruvienne.

 

Au Mexique, la plupart des mesures mises en œuvre par EQUIS Justicia consistent en des campagnes de sensibilisation, des études et l'organisation de séminaires. Les inégalités entre les sexes ne peuvent et ne doivent pas être combattues uniquement par le biais de la loi et de la justice. Les valeurs de la société mexicaine et l’image de la femme doivent aussi changer. Cela implique une éducation plus inclusive et féministe ainsi qu’une sensibilisation des citoyens à la question des droits des femmes. Par exemple, en 2012, EQUIS a lancé un projet en collaborations avec 12 organisations locales afin d’identifier les obstacles auxquels les femmes sont confrontées pour pouvoir recourir au système judiciaire au Mexique. EQUIS a démontré l'existence de stéréotypes et de discriminations dans les différentes étapes du processus pénal et même dans certaines lois qui entravent l'accès des femmes à la justice. De plus, en créant un réseau de quatorze organisations présentes dans cinq États fédéraux du pays, l'ONG a réalisé des études documentant à la fois la manière dont les stéréotypes et les préjugés des personnes détenant le pouvoir judiciaire aboutissent à des résolutions injustes. EQUIS Justicia est une organisation fondamentale pour lutter contre les inégalités et le système judiciaire discriminatoire du Mexique.


D'autre part, l'ONG a contribué à la formation du « Réseau des femmes mayas pour la justice » composé de 40 organisations de femmes autochtones. Depuis 2016, EQUIS accompagne le Réseau dans son travail de défense des droits des femmes. L'ONG participe activement à une réflexion sur la notion de justice pour les femmes en ce qui concerne leurs droits, leur rôle dans la société, l'image de leur corps, etc. Ce réseau a permis aux femmes mayas de s'émanciper en leur donnant une voix et une plus grande visibilité pour faire valoir leurs droits en tant que femmes et en tant que femmes autochtones.

 

Enfin, EQUIS Justicia a également œuvré pour la défense des droits des femmes transgenres qui subissent beaucoup de discriminations, non seulement de la part de l'État mais aussi d’acteurs privés tels que les entreprises et de la société en général. En 2015, l'organisation a aidé des personnes transgenres victimes de discrimination de la part du personnel de sécurité d’un centre commercial à déposer une plainte auprès du Conseil pour la prévention et l'élimination de la discrimination de Mexico (Copred) avec la collaboration du Réseau des jeunes transgenres.

 

Au Chili, Compromiso Migrante accompagne les migrants dans leur intégration à la société chilienne. À travers ses séminaires, événements et foires, l'ONG permet aux immigrants de s'installer au Chili en utilisant les instruments juridiques, en respectant la loi afin qu'ils ne soient pas expulsés, surtout après la nouvelle loi de Gabriel Boric qui empêche les immigrants en situation irrégulière d'entrer dans le pays. Les événements et les foires organisés font connaître la communauté immigrée aux citoyens chiliens. Différentes foires ont été organisées pour présenter la communauté colombienne et vénézuélienne. Ces événements permettent aux immigrants de partager leur culture, de développer leur réseau et de s'intégrer à la société chilienne. De plus, l'organisation travaille en collaboration avec les conseils régionaux afin de donner une voix aux immigrants et aider à développer des politiques migratoires à l’échelle régionale. En collaboration avec d'autres associations et organisations, Compromiso Migrante organise des ateliers de professionnalisation ou des activités créatives pour permettre aux immigrants de développer de nouvelles compétences et leur réseau professionnel. On trouve sur leur site web différentes informations officielles du gouvernement chilien concernant l’immigration. Pour conclure, l'organisation accompagne les immigrants dans leur processus d’intégration à la société chilienne en les soutenant tout au long des démarches administratives et en leur apportant un soutien social et émotionnel.

 

 

 

Conclusion


inégalités amérique latine ONG

 Pour conclure, on peut affirmer que les ONG sont des acteurs fondamentaux de la réalisation des Objectifs de Développement Durable (ODD). Elles sont des représentants des ODD à travers leur finalité sociale ou environnementale. Elles jouent parfois un rôle essentiel dans la communauté pour laquelle elles agissent et peuvent devenir des groupes d'intérêt influençant les politiques des différents gouvernements. Toutefois, la dépendance de ces organisations aux subventions publiques peut affecter leur capacité à fonctionner et atteindre leurs objectifs. La capacité des ONG à agir dépendent, en partie, de la volonté des gouvernements de participer à des actions de développement durable. Souvent, les ONG opérant dans des pays sous-développés ne peuvent compter que sur le soutien de gouvernements extérieurs au leur ou sur des fonds privés et des dons.


De plus, les ODD ont été critiqués à plusieurs reprises, ces derniers étant souvent considérés comme trop ambitieux, ambigus et peu clairs pour pouvoir les réaliser. De plus, la capacité d'action des ONG et la réalisation des ODD dépendent beaucoup de la situation économique des pays. Les crises géopolitiques comme les guerres, les crises économiques comme la crise de 2008, ou encore les crises sanitaires comme le COVID peuvent affecter la situation des populations et accentuer les inégalités existantes.

 

Dans le cas de l'Amérique latine, elle a été durement touchée par cette crise sanitaire qui a réduit en poussières une grande partie des progrès réalisés en termes de développement durable. L'amélioration de plusieurs indicateurs socio-économiques au début du XXIe siècle a été totalement anéantie par la pandémie, retardant une éventuelle réalisation des ODD dans la région.


Quant aux ONG, elles constituent des acteurs actifs de la société civile pouvant influencer les politiques mises en œuvre par les gouvernements latino-américains. Cependant, ces mêmes organisations ont également été critiquées pour les sommes d'argent qu'elles manipulent. Le manque de transparence des ONG latino-américaines a été dénoncé à plusieurs reprises. Quant au financement des ONG latino-américaines, elles dépendent beaucoup des fonds des pays du Nord, de leurs entreprises privées et des gouvernements, ne favorisant clairement pas la mise en œuvre de financements locaux ou régionaux et augmentant la dépendance des ONG latinoaméricaine aux fonds étrangers.


[1] « Chapitre X : Le Conseil économique et social (articles 61 à 72) | Nations Unies », Nations Unies (Nations Unies), consulté le 1er novembre 2023

Aujourd'hui, les ONG en Amérique latine se concentrent principalement sur la lutte contre la pauvreté, les droits des femmes, le commerce équitable, le respect des droits de l’Homme, l'éducation et la santé et ainsi répondre aux besoins de leurs territoires comme nous le verrons dans la prochaine partie de l'essai.

[2] « Assemblée générale des Nations Unies », Nations Unies, consulté le 1er novembre 2023  https://www.un.org/es/ga/president/65/issues/sustdev.shtml.

[3] Mirtha Moran, « The Agenda for Sustainable Development », Nations Unies, consulté le 1er novembre 2023  https://www.un.org/sustainabledevelopment/es/development-agenda/.

[4] RAE-ASALE et RAE, « éducation | Dictionnaire de la langue espagnole », « Dictionnaire de la langue espagnole » - Édition tricentenaire, consulté le 4 novembre 2023  https://dle.rae.es/educación.

[5] L’ascension socio-économique fait référence à la progression d'un individu dans le statut social.

[6] « Plus de 104 millions d'enfants et de jeunes – 1 sur 3 – ne vont pas à l'école dans les pays touchés par la guerre ou les catastrophes naturelles », UNICEF, consulté le 4 novembre 2023,  https://www.unicef.org/es/comunicados-prensa/m%C3%A1s-de-104-millones-de-ni%C3%B1os-y-de-j%C3%B3venes-1-de-cada-3-no-van-la-escuela-en-los.

[7] « Définir l'inégalité | SDGs Today », PNUD, 20 juin 2019,  https://sdgs.undp.org/2019-inequality/es/defining-inequality.html.

[8] « Introduction à l'inégalité entre les sexes », Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), 2021

[9] « Les femmes, l'entreprise et le droit », Banque mondiale, consulté le 9 novembre 2023  https://wbl.worldbank.org/es.

[10]« Définition de la violence sexiste » Gouvernement de l'Espagne

[11] Amérique latine et Caraïbes : un regard vers l'avenir à partir des Objectifs du Millénaire pour le développement : Rapport régional de suivi des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) en Amérique latine et dans les Caraïbes, 2015 (Santiago : Nations Unies, CEPALC, 2015).

[12] Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), sur la base de chiffres officiels Les chiffres de 2022 sont des estimations de la CEPALC, Panorama social de l'Amérique latine et des Caraïbes, 2022 Santiago, 2022

[13] Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), Défis et stratégies de développement durable en Amérique latine et dans les Caraïbes, 2018

[14] Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), Défis et stratégies de développement durable en Amérique latine et dans les Caraïbes, 2018

[15] Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), sur la base d'enquêtes sur l'emploi dans les pays de la région. * Argentine, Brésil, Chili, Costa Rica, Mexique, Pérou, République dominicaine et Uruguay

[16] Panorama Social de América Latina 2020 (CEPAL, 2021), https://hdl.handle.net/11362/46687.

[17] « Les impacts sociodémographiques de la pandémie de COVID-19 en Amérique latine et dans les Caraïbes », CEPALC, 2022.

[18] « Les impacts sociodémographiques de la pandémie de COVID-19 en Amérique latine et dans les Caraïbes », CEPALC, 2022.

[19] « L'Amérique latine et les Caraïbes doivent accélérer le rythme pour atteindre les objectifs de développement durable d'ici 2030 », Texte, CEPALC (Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes), consulté le 20 février 2024 https://www.cepal.org/es/comunicados/america-latina-caribe-debera-acelerar-paso-lograr-cumplimiento-objetivos-desarrollo.v

[20] Sonia Arellano-Lopez et James F. Petras, « ONG et réduction de la pauvreté en Bolivie », Development and Change, vol. 25 (3), p. 555-68, 1994.

[21] « Nous | Migrant Commitment", Migrant Commitment, consulté le 10 novembre 2023  https://compromisomigrante.cl/nosotros/.

[22] « World Bank Open Data », Données ouvertes de la Banque mondiale, consulté le 9 novembre 2023  https://data.worldbank.org.

[23] « World Bank Open Data », Données ouvertes de la Banque mondiale, consulté le 9 novembre 2023  https://data.worldbank.org.

[24] Inégalité en Amérique centrale, au Mexique et dans les Caraïbes : analyse des lacunes et recommandations, vol. 1 (Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes, 2023),  https://www.cepal.org/es/publicaciones/49031-desigualdad-centroamerica-mexico-caribe-analisis-brechas-recomendaciones-vol-1.

[25] « Informations sur la violence à l'égard des femmes », Secrétaire exécutif du Système de sécurité nationale, 2019.

[26] « Défis et défis des femmes au Mexique », Gouvernement du Mexique, consulté le 10 novembre 2023  http://www.gob.mx/conavim/es/articulos/mes-de-la-mujer-retos-y-desafios-de-las-mujeres-en-mexico?idiom=es.

[27] Fernando Cortés, « INÉGALITÉ ÉCONOMIQUE ET POUVOIR AU MEXIQUE », Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), 2011.

[28] « World Bank Open Data », Données ouvertes de la Banque mondiale, consulté le 9 novembre 2023  https://data.worldbank.org.

[29] « World Bank Open Data », Données ouvertes de la Banque mondiale, consulté le 9 novembre 2023  https://data.worldbank.org.

[30] « Peru General Overview », Text/HTML, Banque mondiale, consulté le 11 novembre 2023  https://www.bancomundial.org/es/country/peru/overview.

[31] « L'économie informelle au Pérou : situation actuelle et perspectives », Centre national de planification stratégique (CEPLAN) - Gouvernement du Pérou, consulté le 11 novembre 2023  https://www.ceplan.gob.pe/documentos_/economia-informal-en-peru/.

[32] « World Bank Open Data », Données ouvertes de la Banque mondiale, consulté le 9 novembre 2023  https://data.worldbank.org.

[33] « World Bank Open Data », Données ouvertes de la Banque mondiale, consulté le 9 novembre 2023  https://data.worldbank.org.

[34] Maximiliano Aguilera, « Le Chili se classe au premier rang en matière de développement humain parmi les pays d'Amérique latine », AGCID - Agence chilienne de coopération internationale pour le développement, consulté le 11 novembre 2023  https://www.agci.cl/sala-de-prensa/944-chile-se-ubica-en-primer-lugar-en-desarrollohumano-entre-los-paises-de-america-latina.

[35] « Chile General Overview », Text/HTML, Banque mondiale, consulté le 11 novembre 2023  https://www.bancomundial.org/es/country/chile/overview.

[36] « Estimation du nombre d'étrangers ayant leur résidence habituelle au Chili au 31 décembre 2020 », Institut national de la statistique du Chili, 31 juillet 2021

[37] « L'EXPÉRIENCE MIGRATOIRE DES VÉNÉZUÉLIENS QUI S'INSTALLENT AU CHILI » Organisation internationale pour les migrations (OIM), 2019

[38] « Éducation et innovation », Ayuda en Acción Perú, consulté le 12 novembre 2023  https://ayudaenaccion.org.pe/educacion/.

[39] « Éducation et innovation », Ayuda en Acción Perú, consulté le 12 novembre 2023  https://ayudaenaccion.org.pe/educacion/.

[40] « Inclusive value chains », Ayuda en Acción Perú, consulté le 12 novembre 2023  https://ayudaenaccion.org.pe/cadenas-valor-inclusivas/.


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